Le scoring et la compétition ont toujours été au cœur du jeu vidéo depuis ses touts débuts. Certains joueurs se sont lancés une forme de défi : terminer leurs jeux préférés le plus vite possible, quitte à en violer les règles les plus élémentaires.
 

  • Qu’est-ce que le speedrun ?
  • Des communautés soudées et compétitives
  • Des explorateurs de « l’exploit »
  • Pourquoi s’intéresser au speedrun en tant que développeur ?
  • Les jeux les plus populaire du speedrun

 
 

Qu’est-ce que le speedrun ?

L’idée du speedrun est très simple. Il suffit pour un joueur de (tenter de) finir un jeu le plus vite possible. Dans l’absolu, n’importe quel titre peut être speedrunné, à l’exception des autoscrollers ou des jeux de rythmes. Y compris ceux où la notion de vitesse peut sembler étrange, comme Animal Crossing.
Il a pour cela le droit d’utiliser tous les outils et les astuces à sa disposition : raccourcis, objets, mécaniques de gameplay, stratégie optimale… La manière de mesurer son temps dépend des règles de chaque communauté, mais traditionnellement on stoppe le chronomètre au dernier input du joueur (lorsqu’il arrive à la cinématique de fin du jeu).
 

Une compétition où le glitch est roi

Toutefois, le speedrun se démarque souvent par le fait que l’utilisation d’exploits, bugs et glitchs sont la plupart du temps autorisés (certains jeux ont des catégories avec et sans). Des anomalies que seul des centaines d’heures d’exploration et d’expérimentation sont capables de déceler.
Beaucoup de speedrun prennent alors une forme bien différente de ce qu’on pourrait voir lors d’une session normale de jeu. Les personnages sont régulièrement catapultés à travers les murs, glissent sur de longues distances, nagent dans l’air, lévitent, utilisent des options de déplacement étranges pour être 5% plus rapides ou sautent purement et simplement des étapes entières du jeu.
Tant que le joueur n’utilise aucune intervention externe au jeu et qu’il l’utilise tel qu’il a été conçu, ces bugs ne sont pas seulement tolérés : ils sont même encouragés. En plus de rendre ces courses étranges, amusantes et souvent impressionnantes, les speedruns donnent aussi une excellente occasion d’étudier les failles qui apparaissent lorsque ces jeux sont poussés à l’extrême.
 

Le Tool Assisted Speedrun

En parallèle au speedrun « classique », réalisé en direct par un humain, on retrouve aussi une sous-section très populaire : le Tool Assisted Speedrun (ou TAS). Ici, c’est une machine qui joue, ou plus précisément, qui enchaîne très rapidement des combinaisons de touches précises, soigneusement calibrées par le speedrunner.
Grâce à des outils facilement trouvés dans les émulateurs, le joueur est capable de contrôler très précisément le flot du jeu, de modifier frame par frame son avancée et d’effectuer des glitch très spécifiques qui seraient normalement infaisables ou risqués par un humain. Un TAS représente en quelque sorte un speedrun parfaitement exécuté. Le travail du runner est simplement de l’optimiser du mieux qu’il peut. Ils tendent ainsi à être bien plus extrêmes et rapides que leurs équivalents humains.
 

Des communautés soudées et compétitives

Dans l’absolu, rien n’empêche un joueur de speedrunner un jeu seul. Toutefois, c’est cette activité brille bel et bien par son aspect communautaire, car le speedrun repose sur deux aspects : la compétition et le spectacle.
On retrouve les plus anciennes traces de speedrunning avec un concours lancé par Christina Norman sur le jeu Doom, dès 1994. Rapidement renommée les « Doom Honorific Titles », cette idée s’exporta progressivement vers d’autres types de jeu avant de véritablement exploser avec l’arrivé l’internet 2.0, autour de 2007.
Aujourd’hui, la plupart des jeux populaires voient fleurir spontanément autour d’eux des communautés désireuses de le finir le plus vite possible. Elles peuvent apparaître par le biais de sites dédiés, de forums ou plus simplement d’un Discord spécialisé.
En plus de régulièrement se défier et de comparer leurs temps contre celui d’autres joueurs, ces derniers organisent de véritables réseaux dans le but de s’entre-aider et d’échanger leurs « tricks » afin d’exploser le prochain record.
Les speedrunners les plus talentueux n’hésitent pas à enregistrer et à steamer directement leurs performances, le plus souvent par le biais de Twitch. Ces derniers réussissent régulièrement à rassembler un nombre important de spectateurs, désireux de soutenir leur athlète ou d’assister peut-être à la naissance d’un nouveau record.
 

La GDQ : le grand rassemblement du speedrun

Deux fois par ans, ces fous de la vitesse se regroupent sur place ou en ligne pour assister aux Games Done Quick, des événements spécialement dédiés au speedrun.
On y retrouve les plus grands noms de leurs disciplines respectives qui y montrent leurs talents, se défient sous la forme de courses ou effectuent même des speedruns de jeux réputés pour être très mauvais.
Il s’agit aussi d’un théâtre de prouesses vidéoludiques plus étranges ou même impressionnantes. Le joueur Zallard1 s’est par exemple démarqué l’année dernière pour avoir battu Punch Out !! … avec les yeux entièrement bandés. Les fonds récupérés lors de l’événement sont par la suite donnés à des œuvres caritatives.
 
 

Des explorateurs de « l’exploit »

Les performances extrêmes de ces speedruns ne sont que rarement le fruit d’une seule personne. En parallèle aux runners, ceux avec la manette entre les mains, beaucoup d’hommes et femmes de l’ombre effectuent des recherches en détail spécifiquement pour déceler les craquelures à exploiter.
D’autres n’hésitent tout simplement pas à hacker le jeu directement afin de décortiquer la manière dont il fonctionne. De nouveaux glitch et astuces sont ainsi très régulièrement découverts. Plus un jeu est vieux, populaire et à de personnes travaillant dessus, plus il tend à être exposé à nu.
Dans les plus exploitables d’entre eux, il est même possible d’effectuer des injections de code, de modifier, éditer et tromper la manière dont les fichiers doivent être lus.
Certains jeux comme the Legend of Zelda : Ocarina of Time peuvent ainsi « terminés » en forçant la cinématique de fin à charger prématurément. D’autres, comme Pokémon, peuvent même être programmés pour être terminés dès l’écran de présentation du jeu.
 

Différents types de speedruns

Tous les jeux ne reçoivent pas la même attention de la part des speedrunners. Très souvent, la popularité d’un speedrun dépend directement de la popularité du jeu en lui-même, mais plusieurs autres facteurs vont rentrer en compte, comme le genre de jeu.
Le but d’un speedrun est avant tout de proposer un spectacle. Au-delà de la simple performance, l’attrait principal pour le spectateur est de voir un mix entre les prouesses techniques du speedrunner et les bugs qu’il est capable de reproduire et d’exploiter pour progresser le plus vite possible.
Ce showmanship se retrouve directement dans les performances des streamers, qui effectuent souvent des manœuvres risquées pour leur public ou qui meublent les phases d’attentes de petites chorégraphies et bugs mineurs.
Les jeux de plateforme (ou les action-adventure avec beaucoup d’aspects de platforming) tendent à être les plus représentés dans le speedrun. Entièrement basés sur le mouvement et les options de déplacement, ce sont eux qui prodiguent le plus de liberté au joueur, ainsi que ceux les plus susceptible à des glitchs capables de sauter des pans entiers du jeu.
A l’inverse, la plupart des RPG se prêtent beaucoup moins au speedrun, beaucoup plus linéaires et limités. Certains jeux, comme ceux de la série Final Fantasy, prennent souvent plusieurs heures pour être complétés, même avec toutes les astuces et techniques utilisées par les runners.
 

Pourquoi s’intéresser au speedrun en tant que développeur ?

Un regard sur la programmation

Si vous comptez travailler plus tard dans les métiers du jeu vidéo, étudier des speedrun peut être une activité riche en leçon de programmation et de game design.
La grande majorité des jeux speedrunnés sont méthodiquement démantelés par les communautés travaillant sur eux. Il est ainsi très facile d’examiner leurs fonctionnements, leurs faiblesses, leurs mécaniques et bien d’autres spécificités qui seraient autrement invisibles aux yeux du joueur.
Le speedrun exacerbe par exemple les problèmes liés au moteur physique, la gestion de scripts, les problèmes de collisions ou même plus simplement l’ergonomie du jeu, qui bien souvent n’est pas conçue pour de telles vitesses.
Le travail effectué sur ces jeux est tout bonnement colossal, et presque toujours ouvert au public pour peu qu’on sache où chercher. Cela permet de jeter directement un coup d’œil à la manière dont sont programmés beaucoup grands classiques vidéoludiques, afin de réutiliser ou d’améliorer leurs techniques.
Super Mario World en est un bon exemple. Ce jeu est si simple et bien connu que les speedrunners et romhackers sont parvenus à reconstituer son code source par rétro-ingénierie. Cela permet non seulement de comprendre très précisément son fonctionnement, mais aussi de le modifier ou de le transformer. Voici par exemple une vidéo d’un streamer qui est parvenu à reprogrammer le jeu flappy bird par une injection de code. 
 

Prévoir son jeu avec les speedrunners en tête.

Si vous cherchez sérieusement à créer un jeu, pour peu qu’il ait la capacité de devenir un tant soit peu populaire, il est très possible qu’il soit speedrunné par quelques personnes.
Comprendre les différentes méthodes utilisées par les speedrunners peut vous aider à connaître les points faibles dans votre programmation, et ainsi de corriger des problèmes. Vous aurez ainsi l’opportunité de créer une expérience beaucoup moins sujette à des erreurs ou à des exploits découverts par les joueurs.
Rien de nous empêche cependant de créer un jeu qui encourage le speedrun. Beaucoup de développeurs aujourd’hui font des efforts au niveau de l’ergonomie et des performances de leurs jeux pour pouvoir satisfaire les besoins de ces runners.
Il peut s’agir de choses simples, comme la capacité de sauter les cinématiques, le tutoriel du jeu ou de s’assurer qu’il ne crée par d’erreurs s’il est exécuté trop rapidement. Si vous créez un jeu de plateforme, rien ne vous empêche par exemple de créer des chemins additionnels très durs d’accès mais empruntables par ces fous de la vitesse.
Certains n’hésitent pas à tout simplement inclure un chronomètre directement dans le jeu, un clin d’œil très évident envers ces communautés.
 

Les jeux les plus populaire du speedrun

 

Super Mario 64

Super Mario 64 est un des jeux les plus influents et populaires de son temps et il possède encore une très forte communauté de speedrunners. Pionnier du platformer 3D, ce jeu commence à montrer son âge, ce qui se traduit par des options de déplacement très étranges. Mario y est capable d’aller des vitesses extrêmes en arrière, ou même d’atteindre des univers parallèles par pure conséquence mathématique du moteur physique.
Le record actuel est détenu par le joueur japonais KANNO, en 6m 36s 430ms avec zéro étoile récupérée (il en faut normalement au moins 60). Toutefois, beaucoup d’autres joueurs ont dépassé le simple stade de finir le jeu et se lancent souvent des défis, comme le terminer sans jamais presser le bouton de saut.
 

The Legend of Zelda : Ocarina of Time

Plus ou moins tous les jeux Zelda possèdent leurs propres communautés de speedrunners, mais aucune ne dépasse en taille celle d’Ocarina of Time. Il s’agit là aussi d’un jeu vulnérable aux exploits et donc la forme a beaucoup évolué au fil des découvertes des runners.
Si jadis ce speedrun était principalement composé de passages de jeu joués à toute vitesse, en passant seulement à l’essentiel, il s’est récemment de plus en plus concentré sur l’utilisation du « wrong warp » glitch. En trompant les fichiers du jeu par plusieurs manipulations spécifiques, il est possible de le forcer à charger la cinématique de fin à la place d’une autre très tôt dans le jeu.
Aujourd’hui, c’est le français Amaterasu qui détient le record en ayant fini ce jeu autrement gigantesque en seulement 7 minutes. Pour voir un speedrun plus fidèle à l’esprit original du jeu, la catégorie « no wrong warp » peut être terminée en seulement 33 minutes et 4 secondes.

 

Portal 1 et 2

Portal fonctionne sur un principe simple. Il s’agit d’un jeu de puzzle ou d’un click, on peut créer un portail bleu, de l’autre, un portail orange. Interconnectés, ils permettent de créer une fenêtre téléportant tout ce qui passe à travers elle.
Sans grande surprise, ce gameplay singulier n’a cessé de stimuler l’imagination de nombreux speedrunners qui n’ont eu de cesse de trouver le chemin le plus rapide permis par cette violation des lois de la physique.
L’américain CantEven possède le record sur ces deux jeux, avec 6m 53s 655ms pour le premier jeu et 59m 47s 384ms pour le second, beaucoup plus long.

En cette période de crise sanitaire, Campus des Écoles et ses conseillers pédagogiques restent mobilisés et à votre écoute.

Si vous souhaitez intégrer les métiers liés au monde du gaming et de la création vidéoludique, Campus des Ecoles vous propose des formations spécialement dédiées aux métiers du numérique.
Vous voulez intervenir dans le Game Design et diriger les mondes que vous créez ? Vous trouverez votre bonheur ici.
Le domaine du dessin et de la modélisation vous intéresse plus ? Vous pourrez faire prendre vie à vos créations en suivant une formation de Game artist.

En cette période de crise sanitaire, Campus des Écoles et ses conseillers pédagogiques restent mobilisés et à votre écoute.